Photo de classe de Malcolm X jeune

L’enfance du jeune Malcolm X

Sommaire

Introduction

maison de Malcolm X little Lansing

(La maison d’enfance de Malcolm X inscrite au Registre américain des lieux historiques )

Connaissez-vous Malcolm X jeune ?

Les premières années de Malcolm X sont souvent négligées dans les récits historiques, alors qu’elles posent les fondations de l’homme qu’il deviendra.

On a souvent tendance à attribuer son engagement de la cause à la Nation of Islam, oubliant que les premiers architectes de son militantisme étaient ses parents : Earl et Louise Little

Earl Little, prédicateur baptiste et militant fervent de l’UNIA inspiré par Marcus Garvey, était un homme déterminé à promouvoir l’autonomie des Noirs ( voir article marcus-garvey-et-les-parents-de-malcolm-x ). 

Louise Little, femme éduquée originaire des Caraïbes, veillait à l’apprentissage intellectuel de ses enfants tout en imposant une discipline rigoureuse. 

Dans cet article, nous allons explorer comment l’éducation stricte, les valeurs transmises et l’engagement militant de ses parents ont forgé les premières années de Malcolm X, posant ainsi les bases de son combat futur.

Déménagement Constant

photo d'une famille noire en amérique

(Portrait de famille afro-américaine, sur une automobile, en studio photographique, 1930 )

Malcolm est né dans certaines circonstances comme nous l’avons vu dans l’article précédent ( voir article Malcolm X : Date et lieu de naissance ) et grandit dans une famille profondément influencée par les idées de Marcus Garvey. 

Omaha étant devenu trop dangereux, son père est obligé de déménager sa famille pour fuir les menaces racistes et protéger sa famille. Le prochain stop sera à Milwaukee, dans l’état du Wisconsin où va naitre en 1927 le petit frère de Malcolm, Réginald

Malgré le déménagement, Earl little continue son travail pour l’organisation et va meme devenir  le président de l’unité économique de l’UNIA Milwaukee grâce à son dévouement et son travail acharné.

Pour les besoin de l’UNIA, Earl est appelé à changer de ville et d’aller organiser la petite communauté noire de Lansing qui commence à grandir.

La famille déménage alors dans la rue Logan à Lansing, Michigan, où naîtront Yvonne en 1929 et Wesley, le dernier enfant du couple, en 1931. De manière surprenante, Earl Little choisit d’acheter une maison dans un quartier majoritairement blanc, une décision qui ne sera pas sans conséquences.

Une enfance sous la pensée Garvey : La rigueur et l’espoir

Earl et Louise étaient de fervents partisans de Marcus Garvey et de l’UNIA (Universal Negro Improvement Association). Le nationalisme noir et l’émancipation des Noirs étaient au cœur de leur engagement. Ils inculquaient à leurs enfants l’importance de l’autonomie économique, du respect des valeurs africaines et de la lutte contre l’oppression raciale.

À la maison, Earl Little exerçait une autorité stricte. Chaque enfant, quel que soit son âge, avait une tâche assignée et devait s’y conformer sous peine de sanction. 

Personne n’y échappait… Sauf le jeune Malcolm.

Dans son autobiographie, Malcom raconte :

« Mon père était sévère avec tous les enfants, sauf moi… Presque toutes mes punitions venaient de ma mère.

Earl, profondément inspiré par Garvey, prêchait régulièrement dans la communauté noire et emmenait souvent Malcolm avec lui. Le jeune Malcolm observait son père prêcher avec passion, un souvenir qui marquera durablement sa perception de l’activisme et du leadership.

Contrairement aux autres, Malcolm bénéficiait d’une attention particulière de la part de son père. Earl Little semblait avoir une préférence inconsciente pour lui, en raison de sa peau plus claire et de ses cheveux roux. Comme Malcolm l’explique plus tard dans son autobiographie :

» Je pense sincèrement que, bien que mon père ait été très anti-blanc, il était inconsciemment influencé par le lavage de cerveau des Nègres par les Blancs et qu’il avait tendance à préférer les enfants à la peau claire. J’étais son enfant le plus clair   »

Cette préférence contrastait fortement avec le traitement de Louise envers Malcolm. Plus stricte et dure avec lui, elle ne voulait pas qu’il tire avantage de cette attention particulière. 

Elle lui infligeait des punitions sévères lorsqu’il faisait des bêtises et, parfois, elle lui demandait de bronzer au soleil pour assombrir son teint, le trouvant « trop clair ». Malcolm expliquera plus tard :

« Tout comme mon père m’a favorisé parce que j’étais plus clair que les autres enfants, ma mère était plus dure avec moi pour cette même raison. Elle était claire de peau, mais préférait ceux qui avaient la peau plus foncée. » ( Son 1er fils Wilfried était le plus noir et son fils préféré ).

La peau claire et les traits de Malcolm rappelaient à Louise que son propre père maternel était un Irlandais accusé d’avoir violé sa grand-mère. Ce souvenir lourd influençait inconsciemment son comportement envers son fils.

Louise, originaire des Caraïbes et parlant plusieurs langues, insistait sur l’importance de l’éducation. Elle enseignait à ses enfants le patois de Grenade, le français et leur faisait la lecture, reproduisant le modèle éducatif qu’elle avait connu dans les Caraïbes. 

Cette enfance, marquée par la rigueur paternelle et la sévérité maternelle, dans un environnement militant et souvent hostile, allait forger les premières bases de la personnalité de Malcolm X. Elle lui inculqua la discipline, la résilience et un regard critique sur le monde qui l’entourait.

La mort du père de Malcolm X : Un tournant décisif

tramway des années 1930

( Un Tramway au début du 20ème siècle )

Earl Little était un homme déterminé à lutter pour les droits des Noirs et ne le cachait pas. Par contre, son activisme et son discours sur  l’indépendance économique et le retour en Afrique, inspiré de Marcus Garvey faisaient de lui une cible pour les suprémacistes blancs. 

Le 28 septembre 1931, la famille Little vécut un cauchemar : le corps d’Earl fut retrouvé mutilé sur des rails de tramway à Lansing, Michigan, un crâne fracassé, une jambe sectionnée… Presque coupé en deux.

 Les autorités conclurent à un accident ou un éventuel suicide, affirmant qu’il avait été renversé par un tramway. Mais pour la famille Little et la communauté noire de Lansing, cela ne faisait aucun doute : Earl avait été assassiné par la Black Legion, un groupe paramilitaire qui terrorisait les militants noirs.

Louise, désormais veuve, se retrouva seule pour élever ses enfants. Malgré cette tragédie, et avec l’aide précieuse des aînés Wilfred et Hilda, elle réussit tant bien que mal à faire vivre la famille. 

La séparation de la famille Little

Mais en 1937, Louise entame une relation avec un entrepreneur noir de Lansing. Cette relation, bien qu’elle lui offre un peu d’espoir et de répit, sera de courte durée.

Lorsque Louise tombe enceinte, l’homme quitte brutalement la famille, disparaissant sans se retourner. Le 31 août 1938, Louise donne naissance à son dernier enfant, Robert Little, et choisit symboliquement de lui transmettre le nom de son mari défunt, Earl.

Ce nouveau coup dur s’ajoute aux harcèlements des voisins blancs, qui ne supportent pas la présence de la famille dans leur quartier. Ce climat hostile, couplé aux difficultés financières croissantes, précipite Louise dans une dépression sévère. Incapable de faire face, elle finit par être internée dans un hôpital psychiatrique en 1939.

C’est à partir de ce moment que l’État prend la décision de placer chaque enfant dans une famille d’accueil différente. Cette séparation brutale sera un choc immense pour les enfants Little. Malcolm décrit cet épisode dans son autobiographie comme un moment de rupture définitive :

« Si les services sociaux ont détruit des familles, la mienne sera la première. »

Wilfred et Hilda, les aînés, furent jugés assez grands pour se débrouiller seuls et restèrent dans la maison familiale. Philbert fut confié à une autre famille de Lansing, tandis que Malcolm fut placé chez les Gohannas, une famille noire qu’il connaissait déjà et avec laquelle il avait développé une relation chaleureuse.

Les Gohannas, bien qu’accueillants, ne pouvaient compenser la douleur d’être séparé de ses frères et sœurs. Malcolm trouvait chez eux un certain réconfort, mais cette expérience renforça son sentiment d’abandon et d’injustice. Cette séparation brutale de sa famille élargie fit émerger chez lui une profonde sensibilité face à l’oppression systémique et au déni de justice, qui allait marquer le reste de sa vie.

"Ne le laissez pas manger de porc"

Au moment où l’assistant social est venu chercher Malcolm, il se souvient dans son autobiographie que sa mère lui a dit : « Ne le laissez pas manger de porc. »

Louise Little était issue d’une famille adventiste qui ne consommait pas de porc.

Ce souvenir marquant reviendra à Malcolm des années plus tard, lorsqu’il se convertira à l’islam, une religion qui proscrit également la consommation de porc.

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