Robert Langdon Little : Le frère méconnu de Malcolm X
janvier 4, 2025
Alors que le nom de Malcolm X résonne encore aujourd’hui, l’histoire de son frère cadet, Robert Langdon Little, un acteur majeur de la protection de l’enfance, demeure largement méconnue
N’ayant jamais connu son père et séparé de sa mère étant bébé, Il arrive à se construire et devenir le directeur du New York City Administration for Children’s Services.
À travers sa carrière et ses engagements, il a œuvré pour améliorer le système de protection de l’enfance, portant en lui l’influence et les valeurs transmises par son illustre frère aîné.
Voici son parcours.
Robert Langdon Little n’a pas connu une enfance facile. Robert est né d’une relation ultérieure de Louise Little après le décès du révérend Earl Little, mais a conservé le nom de famille Little.
7 ans après la mort tragique de son mari Earl Little en 1931, Louise Little entame une relation avec un entrepreneur noir local et tombe enceinte. Malheureusement, cet homme disparaît peu avant la naissance de Robert Little, le 31 août 1938 à Lansing, Michigan.
Déjà confrontée à l’absence de soutien et à des difficultés économiques, Louise doit également subir un harcèlement raciste constant de la part du voisinage qui souhaitait les voir quitter ce quartier majoritairement blanc.
Ces pressions sociales et économiques combinées la fait sombrer dans un état de profonde détresse psychologique. En janvier 1939, elle est internée à l’hôpital psychiatrique Kalamazoo.
Les services sociaux interviennent alors et séparent les huit enfants Little. Robert, âgé d’à peine un an, est placé chez George et Beatrice McGuire, des amis proches de la famille, qui lui offrent un foyer aimant et stable.
Malgré cette dispersion, les liens familiaux subsistent, notamment grâce aux efforts de leur sœur aînée Ella qui les réunissait au moins une fois par an à Lansing, notamment avec Malcolm, dont l’influence marquera durablement la vie de Robert
Dans les années 1950, alors que Robert était étudiant, il fut tenté de suivre Malcolm dans la Nation of Islam. Mais Malcolm, bien qu’engagé dans sa propre lutte, l’encouragea à rester à l’université.
« L’une des choses que j’apprécierai toujours, c’est l’importance qu’il m’a fait comprendre de l’école et de se préparer pour l’avenir », raconte Robert, « Il avait une manière de vous parler, de vous regarder, d’être avec vous, qui donnait du sens à tout. »
« C’était une personne très chaleureuse, attentionnée et engagée, et le meilleur modèle qu’on puisse avoir. Il disait ce qu’il pensait et faisait ce qu’il croyait », a ajouté le frère cadet de Malcolm dans une interview au New-York Time, soulignant que les enfants ont aujourd’hui peu de modèles comme lui.
« Il a traversé de nombreux changements. C’est une de ses grandes forces à mes yeux. Il n’était pas figé dans le temps et l’espace. Cela m’a appris qu’il faut affronter les réalités de la vie et y faire face. »
Robert retient de lui cette capacité à évoluer, à affronter les réalités et à ne jamais rester figé dans le passé.
C’est ce conseil qui guida Robert dans son propre cheminement.
Robert Langdon Little fut le premier membre de la famille Little à obtenir un diplôme universitaire. Après avoir terminé ses études secondaires à la Sexton High School, il s’inscrivit à l’Université d’État du Michigan, où il obtint une licence en 1960, puis une maîtrise en travail social et justice pénale en 1963.
Petite anecdote, Malcolm X mentionne déjà les études de son frère dans son autobiographie, qui sera publié bien plus tard. Le passage se trouve à la page 4 du livre, quand il évoque son enfance à East Lansing et ses retrouvailles avec Robert en 1963 :
« Mon père avait persuadé des amis de nous héberger et de nous fournir des vêtements temporairement ; ensuite, il nous a installés dans une autre maison en périphérie d’East Lansing »
« À cette époque, les Noirs n’étaient pas autorisés à East Lansing même après le coucher du soleil. C’est là que se trouve l’université d’État du Michigan. J’ai partagé cette histoire avec un public d’étudiants lors de ma conférence en janvier 1963 ( et j’ai eu le plaisir de retrouver mon jeune frère Robert, que je n’avais pas vu depuis un certain temps ; il y poursuivait des études de psychologie au niveau supérieur. ) »
Diplômé en travail social de l’Université d’État du Michigan en 1963, Robert commença sa carrière dans les services sociaux du Michigan. De simple travailleur social, il devint rapidement directeur de comté et gravit les échelons pour occuper des postes clés dans la gestion des services pour les jeunes.
En 1990, il fut nommé à la tête de l’Administration des Services de Protection de l’Enfance de New York. À ce poste, il s’attacha à décentraliser les services, impliquer les familles dans la prise de décisions, et mettre en œuvre des programmes innovants, comme les subventions pour les adoptions et l’accueil des enfants en situation de handicap.
Comme tout leader engagé, Robert connut aussi des controverses. En 1986, il fut accusé dans une affaire de paiement frauduleux au Michigan, mais les charges ne furent jamais prouvées.
Par ailleurs, durant son mandat à Washington, il fait face à des critiques concernant la gestion des centres pour jeunes. Les principaux griefs incluaient des infrastructures inadéquates et des procédures de suivi jugées insuffisantes par certains observateurs.
En réponse, Robert initia des audits internes et tenta de mettre en place des réformes pour améliorer les conditions dans ces centres.
Malgré ces controverses, ces épreuves n’entament pas sa volonté d’apporter des changements structurels dans l’intérêt des enfants.
Robert était décrit par ses collègues comme un homme réfléchi, chaleureux et profondément engagé. Amateur de jazz, de pêche et de sport, il menait une vie tranquille avec sa femme Patricia, une enseignante, et leurs deux filles, Sheryl et Elizabeth.
Robert Langdon Little s’éteignit le 23 novembre 1999, à l’âge de 61 ans, des suites d’un lymphome. Mais son parcours reste une source d’inspiration. Si Malcolm X a transformé les consciences avec ses discours enflammés, Robert, de son côté, a agi dans l’ombre pour améliorer la vie des enfants oubliés par le système.
Son histoire, c’est celle d’un homme qui a pris son vécu personnel comme un moteur pour changer les choses. À travers lui, la famille Little a démontré que chaque membre, à sa manière, peut laisser une empreinte indélébile sur le monde.
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